« Habiter ici te permettra de tout recommencer, de tout oublier. » Ça faisait bien sept ans que Kyrian avait emménagé dans ce village. En sept ans, il avait eu le temps de tout recommencer, comme sa mère lui avait dit avant de quitter la capitale. Maintenant, elle ne lui manquait plus du tout. Il avait même presque oublié comment on y vivait. C'était peut-être un peu stupide, mais pour lui, non. Tu tires un trait sur ton passé, c'est de cette façon qu'il avait interprété les paroles de sa génitrice. C'est ce qu'il avait fait, du moins, il avait fait ça pour une bonne partie de ses souvenirs. Il en restait toujours quelques-uns qu'il ne souhaitait pas oublier, dont il ne parlerait jamais à personne. Kyrian ferma la porte à clef. Il ne devait être que dix heures du matin, tout au plus. Il était debout depuis longtemps, mais sortir, il le faisait de moins en moins. Ses jambes étaient devenues extrêmement fragiles. Des chutes, il en faisait de plus en plus souvent. À ce stade de la maladie, il aurait été préférable qu'il utilise son fauteuil roulant. Cependant, depuis qu'il avait été l'acheter avec son père, il avait toujours refusé de s'en servir. S'il ne pouvait plus marcher, cela signifiait la fin pour lui. Alors oui, il marchait lentement, en boitant, se tenant à tout ce qu'il pouvait pour ne pas tomber sur le sol, mais au moins, il marchait toujours. Il ne dépendait pas d'un fauteuil roulant ou bien des autres pour se déplacer. Vous direz peut-être que c'est une fierté mal placée et rien d'autre, qui sait, c'est sans doute la vérité.

Kyrian descendit les marches une par une, faisant attention au moindre endroit où il posait ses pieds. Ses parents étaient absents, il en avait profité pour s'échapper. Qu'est-ce qu'ils pouvaient être protecteurs ... Certes, c'était pour son bien, mais le jeune homme n'en pouvait plus. Même son père avait fini par s'y mettre. Au moindre petit problème, ils en faisaient une montagne. Kyrian n'était plus un enfant, il était capable de se débrouiller par lui-même, mais pendant combien de temps ? Lentement, il traversa la rue, sa destination était gravée dans sa tête. Il ne manquerait plus qu'il sorte en quête d'aventure dans l'état où il était. Il était beaucoup trop gentil, s'il sortait ce jour là, c'était juste pour aller acheter un cadeau à sa mère. Elle lui avait répété des dizaines de fois qu'elle ne voulait rien, qu'elle ne voulait surtout pas qu'il sorte pour faire des achats, rien n'avait réussi à lui faire changer d'avis. Quand il avait une idée en tête, il était impossible de lui la retirer. Dans certaines circonstances, cela pouvait être une qualité, mais dans d'autres, c'était tout le contraire. Le français tourna dans une autre rue, encore et encore pendant dix longues minutes. En temps normal, ce parcours se faisait très rapidement, mais lui, il ne faut pas oublier qu'il était à part.

« Oh Kyrian tu es sorti ? » Le jeune homme s'appuya contre un mur et regarda son interlocuteur. C'était un de ses voisins. Il ne l'avait pas vu depuis des jours et il faut avouer que ça ne lui manquait pas. « Oui, répondit le garçon en reprenant sa route. » « Et qu'est-ce que tu fais dehors ? » Kyrian leva les yeux au ciel. Voilà pourquoi il ne l'aimait pas, il se mêlait toujours de tout. Qu'est-ce qu'il faisait dehors ? Il avait vraiment besoin de le savoir ? Un jour, il avait essayé de le questionner sur sa maladie, mais le français avait vite mis fin à cette conversation. « Je me promène. » « Il fait beau aujourd'hui pour se promener ! Mais dis-moi, tes parents ils ... » « Désolé, mais je rentre dans ce magasin, à une prochaine fois. » Le jeune homme était entré dans le premier commerce venu, n'importe quoi ferait l'affaire le temps que cet idiot le laisse tranquille. C'est d'ailleurs ce qu'il fit. Miracle ! Kyrian regarda autour de lui. C'était la première fois qu'il rentrait dans ce magasin. Il ne savait même pas qu'il existait. Ses yeux firent rapidement le tour du bâtiment. Sans chercher à comprendre quoi que ce soit, il se dirigea directement vers une femme de dos. « Excusez-moi, vous faites partie du magasin ? »

« Votre vie entière vient de changer mademoiselle Evans, au moment où vous avez franchi cette porte, votre vie a changée, pour toujours. » Je n'avais jamais cru au destin, ni même au karma. Je prenais la vie comme elle me venait, j'avais toujours cru qu'en travaillant chez Dior, j'aurais vécu dans le luxe, chose dans laquelle je vivais déjà bien avant mon entrée dans cette marque haute couture, que j'aurais droit à des voyages splendides.. Oui, j'étais un peu bête, enfin, immâture, je pensais que le simple fait de travailler pour une si grosse " boîte " me donnerait des avantages alors qu'en réalité, je devais mériter ces avantages, c'est surement avec cette motivation que j'ai grimpé un à un les échelons de la mode. Certes, j'avais douillé, sué, dormi peu, j'avais souffert, je ne dis pas le contraire mais cette rigueur, cette quantité de travail finit toujours par payer, nos efforts, nos souffrances paient toujours. Ici, en l’occurrence, l'ouverture de ma propre boutique. Elle venait d'ouvrir, nous étions le lendemain de son ouverture, j'avais déjà vendu un ou deux t-shirts, pas grand chose mais pour un début, j'étais contente. Je chipotais à tout et à rien, attendant un potentiel client. Ne voyant personne arriver, l'envie de sortir me prendre un bon cappuccino me prit et je ne sus y résister.

Revenant dans la boutique avec un bon cappuccino et une bonne tartelette au fraise, je m'assis à l'arrière du magasin, là où se trouvait le stock, les dossiers administratifs et ma petite salle de bain ainsi qu'une table avec deux chaises, de quoi vivre une journée entière. Prenant mon ordinateur portable, qui était bien caché, je commençai à surfer sur internet, regardant mon site web, le mettant à jour, le tout en me rassasiant. Je venais de passer au moins une demi-heure et toujours aucun client. J'allais devenir folle. L'envie de dessiner me prit alors, dans des moments de solitude, j'adorais faire cela. Après presque une heure et demi passé là dessus, je venais de créer un début d'habits qui me plaisait assez, peut-être l'améliorais-je plus tard pour qu'il soit présent dans ma boutique à voir. Je commençai vachement à m'ennuyer, pour rester polie. Aussi, je pris des vêtements et commençai à les essayer, roh, il y en avait pas mal qui m'allaient vraiment bien, d'ailleurs, je les plaça dans mon sac à mains, direction la maison. C'est alors que ressortant de la boutique, le dos tourné à la porte d'entrée, fouinant dans mon sac à mains, une énième boîte de tic tac que j'entendis ce bruit. Ce merveilleux bruit que faisait la porte lorsqu'elle s'ouvrait et se refermait. Je ne pus m'empêcher de sourire, c'était un homme, je le sentais grâce à l'odeur délicieuse de son parfum.


« Excusez-moi, vous faites partie du magasin ? » Cette voix, mes yeux brillèrent, ce n'était pas possible que ce soit lui, après tant d'années. C'était impossible, je me retournai doucement.« Oui, je suis... » Je me tus, je venais de croiser ces yeux, c'était lui. Kyrian. Des images se bousculèrent, ma tête me faisait mal. Tant d'années et une bête rencontre dans mon magasin, j'avais le souffle coupé. « la géraan-tee.. » Ces derniers mots furent difficiles à sortir, j'avais envie de le prendre dans mes bras, de le serrer pour lui promettre de ne plus jamais partir, de lui dire qu'il m'avait manqué, que j'étais désolée mais que, finalement, j'avais accompli mon rêve. Mais je savais très bien que je devais surtout pas faire cela. Mes yeux se baissèrent sur ces jambes, il tenait encore debout, dieu merci. Je le regardai et murmurai doucement. « Kyrian.. » Le simple fait de prononcer ce nom fit battre mon coeur plus vite qu'il n'avait jamais battu, je crus qu'il allait sortir de ma poitrine, je respirais fort.

Même quand il était en bonne santé, Kyrian n'avait jamais été une personne qui aime faire les magasins pendant des heures et des heures. Certaines personnes pouvaient rester de longues minutes à flâner dans les rayons à fouiner, mais lui, c'était le contraire. Il n'avait jamais réussi à trouver quelque chose par lui-même. Quand il entrait dans un commerce, la première chose qu'il faisait était de se rendre vers un employé. Ses habitudes n'avaient pas changé avec le temps, elles n'avaient même fait qu'empirer. Désormais, il n'essayait plus de chercher un minimum, ses pas le guidaient directement vers de l'aide. En entrant dans ce magasin, il avait vite remarqué qu'il n'y avait qu'une seule personne dans le bâtiment. Une silhouette féminine qu'il n'avait pas vraiment examiné. Pourtant, il aurait dû le faire. S'il s'était un minimum concentré, il aurait reconnu cette jeune femme. Il se serait souvenu de ce qu'il s'était passé il y a des années. Mais bon, il était idiot.

La demoiselle se retourna lentement. « Oui, je suis... » Sa voix se coupa. Leurs regards venaient tout juste de se croiser. Une bombe éclata dans le crane de Kyrian. Son adolescence repassa dans sa tête en quelques secondes. Tellement de souvenirs qu'il avait essayé d'oublier, mais en vain. Pourquoi ? Après tant d'années, il la revoyait enfin. Non, ce n'était pas une illusion, c'était bien Athéna, cette femme qu'il n'arrivait pas à oublier. Il avait tout fait pour cela pourtant, mais aucun résultat ne s'était produit. « la géraan-tee.. » La voix de la demoiselle vint tirer Kyrian de ses pensées. Le faisant revenir à la réalité. La gérante ? Alors comme ça, elle avait donc réussi. Elle avait réalisé son rêve. C'est bien, non ? Il avait toujours voulu la revoir, rien que pour savoir si elle s'en sortait. Jamais il n'aurait pensé qu'en voulant éviter son idiot de voisin, il y parviendrait. Cette fois, il pouvait dire merci à cet imbécile de Jefferson.

« Kyrian.. » BOUM ! Explosion. Kyrian venait d'exploser de l'intérieur. L'entendre prononcer son prénom venait de le réveiller. Lui faire ressentir des sentiments qui lui manquaient tant. Il détailla son visage dans les moindres détails, restant dans le silence. Avec le temps, elle n'avait fait qu'embellir. Elle était devenue une femme telle de ce nom. Ses traits d'adolescente avaient disparus pour la rendre encore plus féminine. « Ça ... Ça fait longtemps ... Athéna. » En sept ans elle avait changé en bien, lui, en revanche, n'avait fait qu'empirer. Quand il l'avait rencontré, il venait tout juste appris qu'il était atteint de sa maladie. Maintenant, il ne tenait presque plus debout. Il n'avait d'ailleurs pas envie de bouger, il ne voulait pas montrer à Athéna dans quel état il était. « Tu ... Tu es revenu vivre ici ? » Question complètement stupide. Elle était gérante, évidemment qu'elle habitait ici, sinon, son magasin ne serait pas implanté dans ce village. Mais le pauvre jeune homme était intimidé. Il ne réfléchissait pas à ce qu'il disait. Cependant, avant-même que son interlocutrice est pût répondre quoi que ce soit, Kyrian continua : « C'est stupide désolé, évidemment que tu vis ici maintenant ... » Il voulut se rapprocher un peu plus d'elle, mais sa jambe se bloqua encore une fois. Pour ne pas tomber sur le sol, il se retint à la première chose venue : le bras d'Athéna. Si elle n'avait pas été là, il aurait fait une belle chute, encore une me direz-vous. Le français reprit sa respiration et évita de croiser le regard d'Athéna. Lentement, il se remit correctement et lâcha le bras de la demoiselle. « Désolé, j'ai faillit ... J'ai faillit ... Tomber. »

J'étais bouchée bée, j'avais surement l'air d'une idiote.Il n'avait pas vraiment changé, il faisait plus adulte mais il avait toujours ses magnifiques yeux dans lesquelles j'adorais planter mon regard. Il avait toujours l'air aussi mince et musclé mais je voyais bien à sa façon de se tenir que son état ne faisait qu'empirer. « Ça ... Ça fait longtemps ... Athéna. » Cette phrase me déconcerta. Oui, cela faisait longtemps, très longtemps, trop longtemps. Comment avais-je pu oublier d'aller le voir ? Mais comment ! En même temps, je ne voyais pas ce que j'aurais bien pu lui dire " oh salut ! ca fait longtemps, il y a pas de gêne hein ! je suis de retour, allez serre moi dans tes bras ! " Je ne pus que bégayer un semblant de phrase..« ben..oui...je.. » Je repris mon souffle et me calmai. « Oui, cinq ans, ca fait cinq ans. » Je baissai les yeux, honteuse d'avoir passées cinq années entières à " l'ignorer " je le connaissait depuis pas mal d'années, grâce à notre correspondances.. Et j'étais passé peut-être une ou deux fois à Paris lorsqu'il était en vacances là-bas mais après deux ans, nous avions perdu contact. « Tu ... Tu es revenu vivre ici ? » La situation était plus que gênant je crois que lui comme moi ne savions quoi dire. Tout avait tellement changé, j'aurais voulu qu'on soit comme avant, complémentaires, nos paroles sortaient toutes seules, tout était naturel, on était tellement proches tous les deux. J'étais déstabilisée, je ne savais pas vraiment quoi répondre puisque c'était évident mais asse gênant, cinq années d'absences pour revenir comme si de rien n'était...Il ne me laissa pas le temps de répondre qu'il enchaîna.« C'est stupide désolée, évidemment que tu vis ici maintenant ... » J'allais lui répondre que cela ne l'était pas mais il voulut se rapprocher de moi et sa jambe se bloqua, il ne sut se rattraper qu'à mon bras. Ce geste me fit comprendre l'ampleur de sa maladie surtout au stade où il en était arrivé. J'en avais les larmes aux yeux, je savais très bien qu'éprouver de la pitié pour lui n'en changerait rien et cela lui ferait encore plus de mal, c'est ainsi que j'essuya mes larmes. « Désolé, j'ai faillit ... J'ai faillit ... Tomber. » me dit-il en se relevant lentement et en lâchant mon bras, nous étions tellement près l'un de l'autre, je sentais l'odeur enivrante de son parfum, cette odeur dont je raffolais.

Je lui souris, nos regards se croisèrent, encore une fois. Je pris sa main, pour qu'il se remette convenablement. Il leva les yeux et me regarda. Je me sentis rougir et lâchai sa main.« Je... c'est pas grave, tu ne..tu ne t'es pas fait mal ? » J'avais l'impression d'être une cruche, une petite fille timide. Je lui proposai de me suivre dans mon arrière boutique. Il acceptai et je lui proposai une chaise. Je ne savais quoi dire. « alors, hum.. ta vie, quoi de nouveau ? » Je n'avais qu'une seule envie à ce moment, courir me cacher dans un endroit où il ne me trouverait jamais. Me cacher pour ne plus jamais avoir à le revoir, je voulais le revoir mais j'avais peur qu'il se referme sur lui-même qu'il me tourne le dos, si seulement il pouvait lire dans mes pensées et moi dans les siennes.. Je dégageai mon ordinateur en le posant dans l'armoire où je le rangeais. Il me restait un peu de cappuccino, je mis le gobelet en plastique dans la poubelle, qui était située à 3 mètres de la table. Un beau lancée. " PANIIERR " Heureusement, que je ne l'avais que pensé, je l'avais peut-être pensé trop fort car Kyrian me regarda, une lueur de tristesse dans les yeux. Quelle conne, non mais quelle conne. J'avais oublié son attachement au basket, il était le capitaine de son équipe et à cause de sa fichue maladie, il avait du renoncer à son rêve, sa passion, son sport. « excuse moi, je suis stupide, idiote.. » Je venais de faire la plus grosse bêtise, après celle de l'avoir laissé pour vivre mon rêve, je considérais mon départ comme une bêtise niveau sentimental, j'avais laissé mes sentiments de côté pour aller vivre mon rêve professionnel. J'avais fait un sacrifice, il m'arrivait parfois de le regretter mais j'étais tout de même contente d'avoir ma propre boutique.


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Foutue santé qui se détraque quand il ne faut pas. Ouah quelle chance de tomber tous les cent mètres. En cinq ans, tant de choses c’étaient produites. Cinq ans, ça fait combien d’heures ? Beaucoup trop. Kyrian avait été séparé d’Athéna pendant beaucoup trop de temps. Même en essayant de s’intéresser à d’autres demoiselles, il n’avait jamais réussi à l’effacer. Ça lui apprendra à s’attacher trop vite. Après avoir faillit tomber, le fait d’éviter le regard de son interlocutrice ne lui permit pas de voir les larmes qui commençaient à arriver dans les yeux de celle-ci. Heureusement … Quoi que, il aurait été possible qu’en la voyant comme ça, il la prenne dans ses bras. Parce que oui, elle était toujours présente dans son cœur. Mais quand était-il pour elle ? La réponse était certainement négative, il ne se faisait pas de film. À New-York, elle avait sûrement dû rencontrer pleins de beaux américains fêtards. Kyrian secoua la tête pour chasser ces images de son esprit. Ce n’était ni le lieu, ni le moment pour s’inventer des scénarios tous plus grotesques les uns que les autres.

Le jeune homme leva enfin les yeux sur le visage d’Athéna. Ses yeux avaient le don de le déstabiliser. Encore une fois leurs regards se croisèrent et encore une fois, son cœur s’emballa. C’est souvent dans ces moments là, dans les films à l’eau de rose, que l’acteur principal se met à dire : « mon cœur bat la chamade. » Et bien là, s’il avait été cet acteur, il l’aurait dit. Pour en rajouter une couche, la demoiselle lui pris sa main pour l’aider à se remettre correctement. Toucher sa peau après toutes ces années, il n’y aurait jamais cru avant aujourd’hui. Les joues d’Athéna devinrent quelque peu rouges. Kyrian dût faire un grand effort mental pour ne pas sourire en voyant cette scène. Une fille qui rougit, il n’y a rien de plus beau. Si si, c’est vrai. Du moins, c’est ce que lui pensait. « Je... c'est pas grave, tu ne..tu ne t'es pas fait mal ? » Dit-elle en lui lâchant la main. Le français esquissa un petit sourire. Alors comme ça elle s’inquiétait ? Le temps que ce n’était pas de la pitié, tout allait bien. « Non, c’est bon, j’ai l’habitude. » C’était la triste vérité, mais maintenant, il avait pris l’habitude de tomber. Le pire n’était pas la douleur, mais ce qui survenait après. La jeune femme lui proposa de s’installer dans l’arrière boutique. Sans broncher, Kyrian la suivit. Elle lui proposa ensuite une chaise, d’après lui, il aurait dû la refuser, mais il ne le fit pas. S’asseyant sur ce meuble, il regarda encore une fois le visage de son interlocutrice. « Alors, hum.. ta vie, quoi de nouveau ? » Cette question fit un peut rire l’intéressé. Il s’attendait à tout, sauf à ça … Malheureusement, il ne s’étonnait pas trop. Cette gêne qui était présente entre les deux jeunes ne faisait que s’accroître un peu plus à chaque parole qu’ils prononçaient. Il ne pouvait pas gommer ce qu’il s’était produit, c’était quelque chose de totalement impossible. Pourtant, il aurait aimé le faire, rien que pour se comporter comme « avant » avec elle. Comme quand ils n’étaient encore que des gosses, la tête pleine de rêves. « Bah … Rien qui ne puisse égaler le fait que tu aies réalisé ton rêve. » Ses paroles étaient sincères. Même s’il lui en avait voulu au départ, quand elle était partie sur un autre continent, de l’autre côté de l’océan, aujourd’hui, il était content pour elle. Athéna, en faisant un peu de ménage, lança un gobelet en plastique dans la poubelle présente dans la pièce. Kyrian ne pût s’empêcher de souffler un peu. Elle ne l’avait pas dit, mais son visage affichait de la satisfaction. La même satisfaction que quand il jouait encore au basket. « Tu verras maman, je vais devenir basketteur professionnel. » Il se revoyait à l’âge de dix ans prononcer ces paroles à sa mère. Elle, souriant, rêvant à ce que son fils pourrait accomplir. Dans treize ans, il serait mondialement connu pour ses performances. Comme quoi, il ne faut pas trop rêver. Dans treize ans, il ne serait pas en train de courir sur un terrain, mais dans un lit d’hôpital. « Excuse moi, je suis stupide, idiote.. » « Athéna … » En voyant le visage confus de son amie, Kyrian se leva. Fixant son visage pour la rassurer, il s’approcha doucement d’elle. « Tu n’es pas stupide et encore moins idiote, t’as compris ? » Il le pensait, comme tout ce qu’il disait, il le pensait réellement. Sans lui demander son avis, il la prit dans ses bras. La serrant délicatement contre son torse. Désormais, il n’y avait plus aucune distance qui les séparait. Il n’y avait plus ces milliers de kilomètres. « Je suis content que tu sois revenue. »

J'essayais de rester la plus naturelle possible mais je savais qu'une gêne restait.Il rigola un peu suite à ma question, il avait remarqué la gêne, comment ne pas le remarquer ? C'était un passage dans notre vie que nous ne serions pas oublier, cinq ans, cela ne s'oublie pas. Alors lorsqu'il répondit à ma question concernant sa vie, je ne pus m'empêcher de rougir.« Bah … Rien qui ne puisse égaler le fait que tu aies réalisé ton rêve. » Il n'avait pas à dire cela, je suis sûre qu'il avait aussi vécu des aventures..« Mais non, je suis sûre que tu as fait de merveilleuses choses. » Il avait l'air sincère dans ses paroles, j'étais certaine que mon départ l'avait blessé, tout comme le fait de ne plus le voir m'avait fait mal. Je me souvenais quand on s'envoyait des lettres lui en anglais et moi, je lui répondais en français, c'était le bon vieux temps, dirons-nous. Le temps où tout était tellement facile, pas de complications, on prenait la vie comme elle venait..Lorsque j'eus lancé le gobelet, j'entendis un léger soufflement de Kyrian, j'aurais voulu me cogner la tête contre le mur comme le font les elfes dans harry potter pour se punir. Pire que moi, tu meurs. Lorsque je me traitai de tous les noms, il murmura mon nom, j'étais toujours confuse. Il se leva et s'approcha de moi, l'envie de me serrer contre lui était grande mais je ne préférais pas le faire. « Tu n’es pas stupide et encore moins idiote, t’as compris ? » Il fit quelque chose qui m'étonna, il me prit dans ses bras je ne pus m'empêcher de me serrer encore plus contre lui, je reniflai doucement. Cela faisait si longtemps et je me rendis compte à quel point cela m'avait manqué, je sentais son coeur battre, le souffle lent de sa respiration suivait le mien. Nous n'étions enfin plus séparé. « Je suis content que tu sois revenue. » Si il savait comme j'avais envie qu'un jour il me dise cela. « Je suis aussi contente d'être revenue, tu m'as tellement manqué. » Je resserrai notre étreinte, une larme perla dans le coin de mon oeil. Je reniflai. Plus rien ne pourrait nous séparer, nous étions de nouveau ensemble, rien qu'à deux. Je respirais son odeur et souriai, j'étais heureuse. J'étais partie vivre mon rêve, pensant que cela me rendrait heureuse mais le véritable bonheur, avait été de revoir Kyrian.« Je suis si contente de te revoir, Kyrian. »

Après de longues années séparés loin l'un de l’autre, Athéna et Kyrian s’étaient enfin retrouvés. Quand il s’était levé pour la prendre dans ses bras, ses membres l’avaient guidé d’eux-mêmes. Comme si ce geste était tout à fait naturel. Sentir ses bras l’enlacer également fit sourire le jeune homme. L’odeur qu’avait ses cheveux, son corps contre le sien, ses mains posées sur son dos … C’est fou à quel point tout cela lui avait manqué. Rien n’y personne n’avait réussi à lui faire oublier cette personne qui lui était si chère. Maintenant qu’elle était de retour, il ne comptait plus la laisser partir et cela, part n’importe quel moyen. « Je suis aussi contente d'être revenue, tu m'as tellement manqué. » Cette phrase réconforta le malade. Au moins, ils ressentaient la même chose. Les new-yorkais ne lui avait peut-être pas monté à la tête finalement. Rien que de savoir qu’elle avait pensé à lui là-bas, rien que de temps en temps, le rendait heureux. Bien qu’il soit dur à accepter par moment le passé ne peut jamais s’oublier. Les sentiments finissent un jour par revenir dans certains cas. « Je suis si contente de te revoir, Kyrian. » L’entendre prononcer son prénom avait encore eu le don de lui faire battre son cœur plus vite. Oui, ce n’était pas comme si c’était quelqu’un de banale qui le prononçait. Il était peut-être idiot, mais l’amour rend aveugle non ?

Kyrian se desserra de l’étreinte. Il posa ses yeux noisette dans ceux d’Athéna et la fixa pendant quelques secondes. Il lui frotta les bras avec ses mains en souriant avant de dire : « Maintenant, tu es là. » Délicatement et sans hésiter une seule seconde, il déposa un baiser sur la joue droite de la jeune femme. Il n’avait pas réellement réfléchi à ce qu’il faisait, ses membres avaient agi d’eux-mêmes, mais avouons-le, il ne regrettait pas de l’avoir fait. Athéna l’avait toujours attiré, depuis le moment même où il avait posé son regard sur elle la toute première fois qu’il l’avait vu. Il n’avait jamais cru au coup de foudre et encore moins au destin. Il se posait souvent des questions à ce sujet. Son destin était-il de mourir ? Si ça se trouve, il était juste venu au monde pour rencontrer quelqu’un en particulier, faire quelque chose de spécial … Il s’était tant de fois posé cette question, pourtant, il n’avait toujours pas réussi à trouver la réponse. Il fallait qu’il se fasse une raison, il ne la trouverait jamais. Même en cherchant pendant des heures, des jours et des années, il y aura toujours des choses qui resterons un mystère.

Après avoir témoigné d’un geste d’affection très significatif, Kyrian s’éloigna de quelques pas d’Athéna en souriant. « Il va falloir qu’on rattrape toutes ces années de perdues. » Il le pensait sincèrement, de toute façon, il ne lui laisserait pas le choix, qu’elle le veuille ou non. Pour ne pas risquer de tomber une nouvelle fois par inadvertance, le jeune homme regagna sa place initiale, c'est-à-dire, sur la chaise où il était assis il y a juste quelques instants. Bien qu’il fasse des efforts à chaque instant, ses jambes se fatiguaient toujours autant. Ça n’allait aller qu’en empirant, mais pour le moment, il n’en était pas encore là. L’idée même qu’Athéna le voit un jour en fauteuil roulant le dégoûtait. Qu’elle le voit dans un lit d’hôpital était une vision encore plus atroce. Il ne pouvait pas faire preuve d’égoïsme sur ce point-là. Mais il était déjà trop tard. S’il avait vraiment voulu éviter cela, il aurait fait demi-tour dès son entré dans le magasin.

Pendant quelques secondes, Kylian plongea ses yeux noisettes dans les miens puis, il desserra notre étreinte et frotta ses mains le long de mes bras. « Maintenant, tu es là. » Il déposa doucement un baiser sur ma joue droite, ses lèvres étaient d'une douceur, incomparable.Je me serrai contre lui, tout était naturel, je n'y réfléchissais pas et cela avait l'air d'être également le cas pour lui. « Oui, et maintenant, je resterais toujours ici. » Je me blottissais contre lui, je sentais pour la énième fois son doux parfum, j'aurais pu le renifler pendant des heures, tellement il m'avait manqué. Un sentiment de réconfort, de chaleur, de sécurité m'envahit. Oui, je me sentais chez moi en présence de Kyrian. J'avais eu pendant cinq années de forts sentiments pour Cooper mais ce n'était pas du tout le même pour Kyrian. A la pensée de Cooper, mon souffle de coupa et le rythme des battements de mon coeur accéléra, comment allais-je parler de Cooper à Kyrian ? Je n'eus pas le temps de me plonger plus dans la question car celui dans lequel j'étais blottie s'éloigna de quelques pas tout en souriant. Quand je repensais à ce geste d'affection qu'il venait de me faire, je me dis que tout était encore possible. Après tout, nous avions notre vie devant nous ! « Il va falloir qu’on rattrape toutes ces années de perdues. » A l'entente de cette phrase, je ne pus m'empêcher de sourire, dévoilant ainsi mes dents blanches pour l'une des premières fois depuis mon retard en Ecosse, et de baisser la tête.J'adorais ce ton malicieux qu'il prenait parfois, cette façon qu'il avait de toujours sortir des phrases qui assurément, me feront sourire. J'étais heureuse, tout simplement. « Ah oui et tu as une idée de comment le rattraper ? » A nouveau, je souris. Ensuite, je suivis Kyrian du regard lorsqu'il rejoint la chaise que je lui avais tendue quelques minutes auparavant. Il ne dit rien mais je savais très bien que c'était à cause de sa maladie. Il m'en avait parlé mais je n'avais pas imaginé le voir un jour dans cet état. Pas que cela me répugnait, loin de là mais j'étais assez mal à l'aise et honteuse d'avoir droit à des jambes. Je redoutais le moment où il allait devoir se déplacer en chaise roulante, ce n'était pas pour moi que je redoutais mais pour lui, lui qui était si sportif et qui adorait marcher, courir. Etait-ce une punition pour avoir fait trop de sport ? Un règlement de compte ou simplement, le destin ? Je ne crois pas vraiment au destin, disons que je n'en fait pas une fixation mais si c'était en effet le destin de Kyrian d'être en chaise roulante, je devrais l'assumer car, j'aime Kyrian et que valide ou pas, mes sentiments resteront pareils. Mais avant que mes pensées dérivent sur une polémique très longue, je m'installai en face de l'homme, puisque le mot garçon ne conviendrait plus, avec qui je venais de passer de supers retrouvailles, bizarres certes mais géniales.

Je plongeai à nouveau mes yeux dans ses yeux noisettes, c'est fou comme j'adorais cela ! C'était un moment que j'appréciais d'une part car il était rare que je fasse cela, c'était quelque chose dont il avait l'exclusivité, d'une autre car j'étais et je suis toujours dingue de ses yeux, leurs couleurs.. Pendant des minutes entières, nous sommes resté immobiles, les yeux plongés dans ceux de l'autre, à contempler leurs beautés, leurs couleurs, leurs particularités. Le silence s'était installé, un silence que je rompis très vite en me levant et en m'approchant de lui, un grand sourire aux lèvres. « Bon allez ! On se bouge, on va hum...on va se manger des frites ! Ouai, j'ai faim, on va manger. » Sans attendre une réponse de sa part, je tendis la main pour qu'il la prenne, pris mon sac à main, fermai le petit coin " privé " du magasin ainsi que la caisse de celui-ci. Puis, je m'avançai, pas trop vite non plus, vers la porte d'entrée pour elle aussi, la fermer. J'étais contente, très contente et le mot était faible.

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